Caméra à l’épaule, Eve Duchemin crée un rapport intime avec les difficultés de Sabrina pour mieux interroger la nature d’une société qui semble avoir oublié la nécessité de sa propre reproduction générationnelle dans son modèle de développement humain et ses fondements affectifs, psychologiques et matérialistes.
Dès la première scène du film, on découvre Sabrina à moitié nue se dandinant gaiement avec une candeur juvénile dans une chambre sans meubles remplie de peluches d’enfant. D’entrée, Eve Duchemin choisit de montrer le corps de cette femme-enfant pour poser la question qui traverse son film, celle du passage à l’âge adulte et de la frontière toute métaphysique entre l’innocence et la responsabilité. Comme la marque de la proximité entre les deux femmes, le corps de Sabrina est cadré très étroitement par la réalisatrice pendant les 56 minutes du film et devient très vite un vecteur de questionnement pour le spectateur, particulièrement dans sa dimension psychologique. Symbole du déni de soi-même, le corps de Sabrina apparaît rapidement comme désacralisé, instrumentalisé et martyrisé. Une désacralisation qui s’exprime ouvertement comme dans la scène où elle montre avec un cynisme plein d’humour les mouvements caricaturaux qu’elle exécute lorsqu’un client s’isole avec elle pour un show privé. D’ailleurs, le discours de Sabrina est très clair sur ce sujet, et on n’est pas surpris de l’entendre dire : « Si je dois montrer mon cul pour de l’argent, je le fais ».
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Réalisation : Eve Duchemin
Image : Eve Duchemin
Avec : Sabrina Himeur et Loïc Guiraud
Montage Image : Joachim Thome
Montage son : Jean-François Levillain
Mixage : Aline Gavroy
Musique : Dez Mona (Belgique)
Production : Les Films grain de sable, Eklektik Productions
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