De quoi ça cause ?
« En 1936, c’était la route la plus utilisée dans le monde. En 1989, elle court le long d’immenses autoroutes, et traverse les banlieues, fine bande de macadam qui traverse les vieux rêves du pays. Quand j’ai filmé pendant cinq mois le long de cette route, je n’ai pas eu l’impression de traverser le passé mais plutôt de révéler le présent. À l’ombre des échangeurs, les centres-villes de verre et d’acier se découpaient à l’horizon, comme des décors de studio. Nous étions dans le Présent, affrontant des temps difficiles. » Robert Kramer
Du Maine à Key West, Doc arpente cette gigantesque colonne vertébrale que près de 80 millions de personnes empruntent chaque jour. Route One / USA a l’apparence d’un road movie où Doc se replonge dans une Amérique qu’il a quittée il y a une dizaine d’années. C’est un retour aux sources de son pays, la Route One portant les marques de 300 ans d’histoires ; un retour à la réalité sociale des USA, avec ses zones rurales, ses grandes villes, ses ghettos ; un retour sur sa propre histoire, les souvenirs de son père et de son enfance refaisant surface ; un retour à sa propre réalité car comme tout road movie qui se respecte, voyager sur les routes c’est voyager d’abord en soi même, c’est une remise en cause de ses engagements et de ses dérives. C’est sur ces multiples mouvements que Robert Kramer construit cette incroyable fresque de près de quatre heures, pourtant simple fragment d’un flux monumental de 65 heures d’images. C’est un voyage social, politique et historique dans ces Etats-Unis si loin, si proches, un voyage humain qui prend la forme d’une introspection que chacun de nous peut nourrir de sa propre histoire. Doc, le médecin, avant de continuer à pouvoir soigner les autres, doit
d’abord se soigner lui-même. « On peut sentir un rapport entre la Route One, qui n’est que l’ombre de l’ancienne, notre passé (l’enfance, l’éducation, des évènements historiques comme la guerre du Vietnam…) et toutes les minorités de la culture américaine. » Kramer imbrique étroitement toutes ces trajectoires de manière simple, évidente, nous offrant une odyssée au cœur du rêve américain aux implications universelles. Route One/ USA n’est pas une fiction, ni un journal, ni un documentaire, mais une œuvre libre qui dépasse les conventions et les carcans esthétiques. Cette hybridation des genres passe d’abord par son personnage principal, Doc. Doc pour doctor, Doc pour documentary.
Extrait d’une cronique sur le site DVD Classik.
La réclame
Kikiafékoi
Réalisation : Robert Kramer
Avec : Paul McIsaac, Jesse Jackson, Pat Robertson
Scénario : Robert Kramer
Musique : Barre Philips, Michel Petrucciani, Pierre Favre, John Surman, Floris Nico Bunink
Photographie : Robert Kramer
Montage : Guy Lecorne, Robert Kramer, Pierre Choukroun, Claire Laville, Keja Kramer
Production : Les Films d’Ici
Editions video : Editions Montparnasse
Distribution : Les Films du Paradoxe