quoi ça cause ?
Dans son livre « Small is beautiful, une société à la
mesure de l’homme », l’économiste Ernst Friedrich
Schumacher décrivait l’importance de l’échelle
humaine, mais aussi l’idée qu’une économie de la
permanence est basée sur l’utilisation soutenable
des ressources naturelles. C’est en hommage à ce
travail que le titre du film a été choisi.
Les règles commerciales et financières issues du
libéralisme et de la mondialisation qui dirigent les
économies agricole et alimentaire de nos sociétés
ont des conséquences catastrophiques tant au
niveau humain et social qu’environnemental.
Pourtant il existe d’autres alternatives. C’est un
problème de choix politique bien entendu mais
nous pouvons jouer un rôle dans les décisions qui
sont prises : à nous aussi d’en comprendre les
enjeux et d’oeuvrer à un monde plus solidaire et
plus respectueux de l’environnement.
Au delà des discours et des bonnes volontés politiques
affichées, les conséquences de l’évolution de notre agriculture
sont là : malbouffe, dégâts environnementaux irréversibles,
conséquences sociales ...
Le constat de la mise à mal des quatre éléments fondamentaux
qui assurent la souveraineté alimentaire à venir : l’eau, la
terre, les semences, et la biodiversité est aujourd’hui alarmant.
Le film d’Agnès Fouilleux nous révèle pas à pas les
mécanismes et les enjeux de la mondialisation et de la
financiarisation de l’agriculture, face auxquels des
résistances commencent à apparaître.
Du paysan au chercheur, de la semence précieusement
conservée au lobbyiste sans état d’âme de Bruxelles, ce
tour d’horizon exhaustif suggère clairement, travaux
pratiques à l’appui, que ce qui est petit, ou du moins pas
trop grand est beaucoup plus “joli “pour notre avenir...
Après le Grenelle de l’environnement, alors que le “bio” a
le vent en poupe, la réalité paysanne prouve que
l’agriculture industrielle et la politique agricole commune
nous amènent droit dans le mur...
Et tant qu’une minorité aura tant d’argent à gagner : rien
ne changera ! Alors réveillons-nous !!
Beaucoup de films sortis ces dernières années traitent
d’une thématique proche, un film de plus sur l’agriculture ?
N.F. :Non. J’ai justement voulu faire un film qui donne une
approche globale : comprendre le système, c’est pouvoir
agir pour faire changer les choses au niveau humain,
environnemental et donc au niveau politique. Cet aspect
politique ne me semble pas abordé dans les films dont
vous parlez, or tout est lié : l’économique, le social,
l’environnemental doivent être considéré ensemble, ils
forment un tout. La Politique Agricole commune par
exemple, il faut comprendre ce qu’elle devient pour
comprendre ce que sera demain…
Dans la forme, j’ai voulu le construire comme un puzzle, le
propos, complexe, s’installe dans le temps. Ce temps,
souvent celui de la parole, est indispensable à une
compréhension en profondeur des mécanismes dénoncés.
Votre titre fait penser à la critique de l’économie de
Shumacher dans les années 70 qui évoquait par la
formule “small is beautiful une société à la mesure de
l’homme...?
N.F. :Oui, il me semble que le problème principal est justement
là. Edgar Pisani explique qu’il vaut mieux 50 fermes de
100 ha plutôt qu’une seule ferme de 5000 ha. On voit
dans le film combien il est difficile pour des agriculteurs
voulant s’installer avec une petite structure respectueuse
de l’homme et de l’environnement de trouver de la
terre... alors que les grosses exploitations ne cessent de
s’agrandir ! On entend souvent « To big to fail », dans le
genre « To small to exist » est adapté à l’agriculture
moderne.
C’est un problème qui concerne l’agriculture mais aussi
tout notre système ! La mondialisation nous a plongée
dans un véritable problème d’échelle : nous vivons au
delà de nos moyens ! Et le libéralisme, la course aux
profits est à l’origine du problème, on concentre les
pouvoirs, les possessions... et tout ça ne peut pas aller
dans le sens de la protection de l’environnement, de la
diversité, des milieux, tous multiples et variés, mais ça ne
va pas non plus dans le sens du respect de l’homme, du
travail et du paysan.
Vous êtes une documentariste militante ?
N.F. :Je suis avant tout concernée en tant que citoyenne par
toutes ces problématiques. J’ai la chance grâce à mon
métier de pouvoir prendre le temps qu’il faut pour
décortiquer des sujets en profondeur et apprendre
comment certaines choses fonctionnent... Ce que les
médias au quotidien n’ont pas le temps de faire. Dans
mes films ce qui m’importe c’est donc de donner à
comprendre pour que les gens se fasse leur propre
opinion sur la question. J’essaye de ne pas prêcher une
vérité, de ne pas avoir une vision manichéenne des
choses et de ne surtout pas tomber dans le spectaculaire !
La réalisatrice :Agnès Fouilleux(2007 :"Un aller simple pour Maoré", "Himalaya, Trois générations en exil", 2005 :"Tibet Clandestin","Vol 4807")
Production/distribution :Les Films Bonnette et Minette