Des hommes et des femmes, nés dans l’entre-deux-guerres ; ils n’ont aucun point commun sinon d’être homosexuels et d’avoir choisi de le vivre au grand jour, à une époque où la société les rejetait. Ils ont aimé, lutté, désiré, fait l’amour.
Aujourd’hui, ils racontent ce que fut cette vie insoumise, partagés entre la volonté de rester des gens comme les autres et l’obligation de s’inventer une liberté pour s’épanouir.
Ils n’ont eu peur de rien.
Ce n’est pas la première fois que nous projetons ce très beau film de Sébastien Lifshitz (réalisateur de "Adolescentes" en 2019 et "Petite fille" en 2020). Il y a presque dix ans, nous le passions à Aurillac, quelques mois après l’adoption de la loi relative au mariage pour tous. Voyez plus bas* le texte écrit à l’époque.
Alors pourquoi le reprogrammer ?
Lorsque la comcom de la Châtaigneraie nous a laissé "carte blanche" sur le thème de la lutte, nous nous sommes questionné.es : quelle lutte pourrions-nous éclairer d’un film ? Sociale, économique, sociétale, environnementale... ?
Et puis, on a repensé aux Invisibles. Ces invisibles qui, toute leur vie, ont lutté pour les droits de chacun.e à disposer de son corps, à vivre sa sexualité et son identité sexuelle librement. Lutté aussi pour que l’homosexualité ne soit plus reconnue comme une maladie (classée en France comme une pathologie psychiatrique jusqu’en 1992). Lutte ô combien d’actualité, lorsque l’on sait que des "thérapies de conversion" (qui prétendent « guérir » l’homosexualité) ont encore lieu de nos jours : depuis janvier 2022, une loi interdit justement les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne.
Aujourd’hui où la question du genre continue de créer des oppositions fortes dans la société, où l’homophobie et la haine de l’autre, du différent, de l’invisible, restent là, vivaces et nauséabondes, y compris dans les discours de certains.es hommes et femmes politiques par temps d’élections... et bien, on s’est dit que ce film, entier, fort et lumineux, était le bienvenu pour témoigner de ce passé et pour continuer la lutte !
NB : Cette soirée se tient dans le cadre d’un week-end "Luttes" au sein de la saison culturelle. La veille, le vendredi 6 mai, à 20h30, aura lieu à Marcolès la représentation de "1336, paroles de Fralibs", de Philippe Durand.
*texte écrit en 2013 :
On s’est dit, c’est un très beau film, il faut le passer.
Et puis il y a eu la résurgence de l’expression homophobe, à l’occasion du débat sur le mariage pour tous, ou plus simplement dans la droite (!) ligne de la fin d’une époque où la mémoire maintenait à l’écart un certain nombre de thèses ayant mené à ...
Alors on devait passer ce film. C’était plus qu’un coup de coeur (même si c’en est un, aussi), c’était une obligation éthique. Non seulement on devait le passer, mais on devait en faire un support de parole, de témoignages, de vécu(s) ....
Ca a été avec nos amis de Cap Conviv’... à la Cave de La Rue de La Coste encore en travaux. Une cinquantaine de personnes a longuement applaudi après pourtant presque 2h de projection. Puis comme à son habitude Cap Conviv’ a payé son coup. C’était la rentrée de l’association après notre assemblée générale d’Octobre 2013 ; le premier film de la saison et quel film !!!!
Les mots du Doc
Ci dessous des extraits de commentaires du réalisateur sur le site de Télérama :
« J’ai essayé de construire Les invisibles autour de séquences où l’on a le sentiment que la parole a le temps de se déployer, qu’elle est brute, naturelle et qu’elle n’est pas manipulée. Même si le montage, bien sûr, sculpte le témoignage et le contracte, j’ai essayé de couper le moins possible pendant le tournage et cette tourterelle, qui vient se poser dans le film, est un instant magique où nous avons retenu notre souffle pour ne rien gâcher, pour laisser s’installer la poésie et l’humour de la scène. J’étais toujours été attentif à rester très concentré, pour sentir ce qui se passait sous nos yeux et ne rien perturber quand la vie se manifestait d’une manière ou d’une autre. »
« Je voulais filmer des personnes âgées qui ne sont jamais montrées, regardées, ni écoutées au cinéma ou à la télévision. Voire à la radio ou dans la presse.
Quand on parle d’eux, c’est pour évoquer la maladie d’Alzheimer ou le trou de la sécurité sociale et je voulais essayer d’inventer quelque chose de plus digne, de plus juste, sur la vieillesse, qui n’est pas forcément une déchéance ou un mouroir. Je trouve malsain que notre société ne représente pas un pan aussi important de sa population et ne la traite que par des clichés, alors qu’il est évident que les personnes âgées ont des choses à raconter et quelles sont intéressantes à regarder.
Loin de l’image apaisée de la grand-mère gâteau et du grand-père qui va à la pêche, on découvre vite des hommes et des femmes dotés d’une parole libre, drôle et souvent crue. Ils sont actifs, engagés, ils ont des avis tranchés et ne sont pas forcément mesurés, ils parlent de sexualité, de désir, d’amour, toutes ces choses auxquelles on n’assimile pas la vieillesse. »
« Je faisais attention quand je rencontrais les “témoins” du film à ne pas leur faire raconter les détails de leur vie pour ne pas déflorer cet instant où quelque chose se “révèle” devant la caméra. J’ai utilisé mon instinct de réalisateur de fiction pour sentir, comme dans un casting d’acteurs, si les personnes que j’avais face à moi pourraient être les “témoins” de mon film. Dans le cas de Monique, c’était évident tout de suite. Elle a une présence, un magnétisme qui se déploie tout de suite à l’écran. Et sa façon de parler dit entièrement qui elle est. »
La réclame
Kikiaféquoi
Pays : France
Production : Zadig Films
Réalisation : Sébastien Lifshitz
Images : Antoine Parouty
Montage : Tina Baz et Pauline Gaillard
Mixage : Alexandre Widmer
Son : Alexandre Widmer, Philippe Mouisset et Yolande De Carsin
Durée : 1h55 minutes