Peuple et Culture Cantal
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Projection de documentaires, ici, là-bas ...

... cinéma d’ici et d’ailleurs ...
Aurillac, Espace Hélitas
La langue de Zahra
Fatima Sissani, France, 2011, 93’

Les Kabyles existent d’abord par la parole. Chaque geste, chaque instant de leur quotidien peut donner lieu à une langue de vers, de métaphores, de proverbes... Ne dit-on pas que dans ces contreforts montagneux dont ils sont les hôtes, la joute oratoire était un exercice courant ?

Découverte de Lussas, nous avons pensé intéressant de lier ce film sur la langue maternelle avec la problématique de notre langue, l’occitan, et de proposer à l’Institut d’Etudes Occitanes de co-organiser cette soirée. L’école occitane "Calendreta" était également présente avec ses enfants bilingues. Une bonne cinquantaine de personnes, donc, pour cette première dans les nouveaux locaux du centre social ALC, en décembre 2011.

Fatima, venue de la capitale tout exprès (et qui n’aura, nous l’espérons, pas regretté le voyage), outre qu’elle est passionnée par la langue de sa mère et la maîtrise que cette dernière en avait, fait parfaitement le lien entre langue, culture et racines, et nous montre à quel point cet ancrage est important. Au cours du débat ont d’ailleurs été évoquées les velléités de certains d’empêcher les enfants d’immigrés de connaître la langue de leurs parents. C’est en effet ce que préconisait le député UMP Bénisiti dans deux rapports en 2005 et 2011. D’après lui et ses camarades de parti, l’apprentissage précoce d’une langue étrangère serait facteur de délinquance. Sous-entendu évidemment les langues non européennes, ce qui montre l’importance du sujet de ce film dans le contexte actuel.

Ce n’est peut-être pas un hasard, vu la prégnance de la question de la langue au Québec, si Fatima a reçu au printemps 2012 le prix du documentaire au festival "vues d’Afrique" de Montréal. En tous, cas, nous la félicitons chaleureusement. Le prix est mérité.

De quoi ça cause

Un

e réalité qu’on se représente mal lorsque l’on plonge dans la société de l’immigration où ces hommes et femmes, souvent analphabètes, sont relégués exclusivement au rang d’ou

vriers et de femmes au foyer…On imagine alors mal les orateurs qu’ils deviennent lorsqu’ils retournent dans leur langue.

Cette réalité, je la pressentais. J’en ai réalisé toute l’acuité, mesuré la dimension en filmant ma mère, son quotidien et son histoire.

J’ai vu, fascinée, une femme arrimée à sa langue de façon indéfectible. Une femme dévoilant une oralité transmise de génération en génération. Une langue charriant éloquence et poésie pour dire l’enfance bucolique, l’exil, la pauvreté… Cette langue, c’est l’ultime bagage que des milliers d’émigrants kabyles ont emporté avec eux… Une langue pour se construire un ailleurs qui ne soit pas que l’exil…


La réclame


La réalisatrice

Fatima Sissani

« C’est en Algérie que je suis née et en France que je vis depuis l’âge de 6 ans. Après avoir obtenu un DEA de droit, j’ai bifurqué, contre toute attente, vers le journalisme. J’ai débuté avec Radio Zinzine, une belle radio libre qui vient de fêter ses quarante ans. D’abord une émission régulière avec le magazine Que Choisir , ensuite avec le Monde diplomatique. Entre les deux, de nombreuses interviews, des reportages… Et puis, il y a eu France culture pour laquelle j’ai réalisé quelques documentaires et portraits. Parallèlement et depuis huit ans, je suis journaliste pour un magazine municipal. Et enfin, la réalisation, cette année de ce premier documentaire cinématographique, La langue de Zahra …

Finalement, l’essentiel de mon travail tourne autour de l’immigration, de l’exil. L’exil en réalité m’obsède, me fascine, pour tout dire me colle à la peau et finit toujours par revenir par une petite porte. Cette fois c’est ma mère qui l’a poussée. Je l’ai laissée s’y engouffrer car je savais que le moment était venu de l’interroger sur ces morceaux de vie que je n’ai pas trouvé le moment ou peut-être l’audace de questionner. »


Kikiafékoi

Réalisation : Fatima Sissani

Image/lumière : Olga Widmer

Montage : Anne Lacour

Son : Olivier Crabbé

Co-production : AJC ! et 24Images

Avec le soutien : Scam