Peuple et Culture Cantal
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Projection de documentaires, ici, là-bas ...

... cinéma d’ici et d’ailleurs ...
Giou de Mamou, salle du Crea
Le thé ou l’électricité
Jérôme Le Maire, 2012, 93’

L’histoire épique de l’arrivée de l’électricité dans un village isolé et enclavé au cœur du Haut Atlas marocain.
Durant plus de trois années, saison après saison, le réalisateur dévoile patiemment les contours de la toile qui se refermera inexorablement sur les habitants d’Ifri.
Sous nos yeux se dessine l‘image d’une modernité impitoyable à laquelle le petit village va être relié.

Un coup de coeur pour ce film vu à Lussas. Coup de coeur partagé vu le nombre de nominations dans tous les festivals et les réaction du public de Giou (une soixantaine de personnes) en cette fin d’hiver 2013.
C’était comme chaque année une nouvelle belle aventure avec Rivage, dans la très belle salle de Giou de Mamou. La soirée s’est poursuivie autour du buffet ouvert et de musique actuelle d’Afrique. On remet ça bien sûr l’année prochaine.

Ifri est un petit village perdu et enclavé au fin fond du Haut Atlas marocain. Pas de route ni de piste, pas d’école, pas de téléphone, pas d’eau courante, pas de poste, pas de police, pas d’hôpital et ...pas d’électricité non plus. Rien que quelques noyers au milieu de champs accrochés à la montagne et trois cents habitants qui les cultivent de façon ancestrale.

Dans ce huis clos, rien ne semble avoir bougé depuis des siècles. Le temps parait suspendu.
Et pourtant, un jour débarque dans le village une équipe de l’Office National de l’Electricité qui vient fièrement annoncer à Ifri de grands changements : l’arrivée prochaine de l’électricité !

Mais les villageois ne veulent pas de cette « nouveauté » qu’ils ne sauraient d’ailleurs pas se payer. Ils veulent une route, le cordon ombilical vital sans lequel ils seront toujours dans un état de survie. Ils ne le savent pas encore (et le spectateur s’en rendra doucement compte), mais Ifri est déjà soumis à l’impitoyable loi de l’offre et de la demande.


Note d’intention du réalisateur

« Vous avez cru nous apporter la Lumière, mais en réalité vous désirez nous entraîner avec vous dans votre Nuit... »
Idder, le Chleuh (Berbère du Haut Atlas), Liminaire des « Pastorales Berbères » de René Euloge, 1930

« Notre métier, c’est de vendre à Coca-Cola du temps de cerveau humain disponible ! »
Patrick Le Lay, Ex-PDG de TF1, 11 juillet 2004

Depuis bientôt un siècle et demi la terre s’électrifie ! Et même si les premiers chantiers pharaoniques de cette révolution sont déjà logés aux « archives » de notre histoire, la progression de cette gigantesque toile d’araignée continue aujourd’hui encore. Depuis l’automne 1882, date de l’apparition simultanée des premiers réseaux à New York, Belgrade et en France, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts... En effet, plus d’un siècle d’inventions nous sépare de ce moment fatidique où la « fée électricité » a commencé à entrer dans les maisons. La liste d’inventions et de progrès est gigantesque et les bouleversements que cela a entraînés sont d’une profondeur insondable !

Or, récemment, en sillonnant les montagnes du Haut Atlas marocain qui sont en train d’êtres électrifiées, j’ai eu un choc. Un soir, dans une maison de terre d’un de ces petits
villages reclus dans la vallée, en scrutant les visages tellement particuliers des berbères qui m’accueillaient et en les voyant hypnotisés par une télévision trônant au centre de la pièce, j’ai eu l’impression de revoir la scène d’« Hibernatus » où Louis de Funès (l’aïeul) se réveille effaré en plein XXème siècle ! Un décalage démesuré entre des hommes et l’époque dans laquelle ils vivent, un voyage dans le temps !

Depuis lors, une image me hante : le toit d’une maison de terre équipé d’une parabole ! Inouïe superposition de deux symboles faisant référence à deux univers quasiment opposés : d’une part le passé (qui est leur présent), l’obscurité, le travail à la main, la lenteur, l’autarcie, l’isolement, la collectivité, l’artisanat, le dénuement, la croyance, ... Et d’autre part le présent, la lumière, la mécanisation, la vitesse, la globalisation, la
communication, l’individualisme, l’industrialisation, l’opulence, le matérialisme,...

Ce que je voulais filmer en suivant l’électrification de ce petit village, c’est précisément la « rencontre » (la collision ?) entre ces deux univers. Et finalement, le reflet que nous voyons dans ces télés trônant au milieu de pièces quasiment troglodytes, n’est-ce pas un peu le nôtre ?
Car l’histoire d’Ifri nous tend un miroir. Elle dessine en creux notre mutation en hommes « modernes » et « évolués » avec tout ce que cela comporte comme questionnement : quelles sont devenues nos valeurs ? Qu’avons-nous du mettre de côté ou laisser en chemin pour en arriver là ? Dans quelle direction avançons-nous ?



Bande annonce



Kikiafékoi


Auteur-Réalisateur : Jérôme Le Maire

Image : Jérôme Le Maire, Jérôme Colin

Son : Jean-Luc Fichefet, Jérôme Le Maire

Montage : Matyas Veress

Production / Diffusion : Iota production, Perspective Films, HKS Productions, K Films


On vous invite à visiter le site du film, plein d’autres renseignements, compléments, rencontres, projets etc...